Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
28 janvier 2012 6 28 /01 /janvier /2012 13:39

 

Les compositeurs que faisait travailler Chopin en priorité à ses élèves étaient : CLEMENTI, MOSCHELES, BACH, HUMMEL et FIELD, comme en attestent les témoignages ci-dessous.

 

 

 

Commentaire de NEUHAUS :

 

"Chopin proposait à ses élèves, pour commencer, de jouer les gammes comprenant beaucoup de touches noires (la plus pratique pour la main droite étant celle de si majeur, et pour la main gauche celle de ré bémol majeur). Il passait progressivement à celles qui en comportent moins, et aboutissait à la plus difficile, qui n'a que des touches blanches, la gamme de do majeur. Son raisonnement était réaliste, pratique, fondé sur une expérience étendue. Et bien que Chopin, compositeur, pianiste et professeur de génie, ait vécu il y a longtemps déjà, des centaines et des milliers d'exercices, études et autres morceaux pédagogiques ont été écrits dans la tonalité chérie d'ut majeur, avec un visible mépris pour les autres tonalités chargées de diéses et de bémols. [...] Je tiens simplement à souligner que la théorie de l'art du piano est fonction de la structure physiologique de notre main et conserve une spécificité qui la distingue de la théorie de la musique. Chopin, professeur de piano, était un dialecticien ; les auteurs d'exercices "instructifs" sont des schématiseurs, pour ne pas dire des scholastiques."

A la lumière de ces considérations si pertinentes on entrevoit les raisons de mécompréhension de Cortot à l'endroit du PM  [Projet de Méthode de Chopin] ; si immense pianiste soit-il, les exercices de ses Principes Rationnels de la Technique Pianistique (Paris, Salabert) commencent quasi tous en do maj.  - étant entendu qu'ils sont à transposer dans les douze demi-tons !

On notera enfin que Chopin faisait travailler les Préludes et Exercices de Clementi dans le même ordre que les gammes ; on commençait par le second cahier qui comprend des études comportant quatre bémols ou dièses et davantage

 

Source : Jean-Jacques Eigeldinger (Chopin vu par ses élèves)

 

 

"Parallélement aux gammes et dans le même ordre de succession, Chopin faisait étudier les Préludes et Exercices de Clementi, oeuvre qu'il prisait à un haut degré en raison de son utilité pédagogique." (Mikuli)

 

 

Les élèves de Chopin, quel que fût leur degré d'instruction, devaient jouer tous avec soin, outre les gammes, le deuxième cahier des Préludes et Exercices de Clementi et travailler surtout la première Etude en la bémol. Toute note sèche ou dure était recommencée et sévèrement relevée. Pour comble de malheur, l'élève rencontrait, au commencement même, un arpège qui a fait verser bien des larmes. Il fallait l'exécuter rapidement, crescendo, mais sans brusquerie. C'est cet arpeggio qui a attiré à une élève cette apostrophe un peu trop verte de la part du maitre qui, tressautant sur sa chaise, s'écria : "Qu'est-ce ? Est-ce un chien qui vient d'aboyer ?"  Je tiens ce détail de feu Mme B[ohdana] Zaleska [Zofia Rosengardt], qui elle-même ne m'a pas ménagé les remontrances en m'indiquant quelques particularités du jeu de Chopin.

Il fallait travailler cette malheureuse Etude de toutes les manières : on la jouait et vite et lentement, et forte et piano, et staccato et legato, jusqu'à ce que le toucher devînt égal, délicat et léger sans faiblesse." (Kleczynski)

 

 

"Il donnait ensuite un choix d'Etudes de Cramer et du Gradus ad Parnassum de Clementi ; les Etudes de style de Moscheles qui lui étaient très sympathiques en vue d'atteindre un plus haut degré de perfectionnement ; des Suites de Bach et des Fugues prises isolément dans Le Clavier bien tempéré. [...] Il ne mettait ses propres Etudes op. 10 et 25 qu'entre les mains d'élèves très avancés." (Mikuli)

 

 

"Chopin donna d'abord à Mme Dubois le second cahier des Préludes et Exercices de Clementi, puis le Gradus ad Parnassum du même et les quarante-huit Préludes et Fugues de Bach. Il avait une haute idée de la valeur pédagogique des ouvrages de Bach ; cela ressort assez de sa recommandation - lors de leur dernière entrevue [1848] - de toujours travailler Bach. "Ce sera votre meilleur moyen de progresser". " (Niecks)

 

 

"Clementi, Bach et Field étaient toujours les auteurs les plus largement mis à contribution dans le cas des débutants." (témoignage de Mathias cité par Niecks)

 

 

Les Nocturnes de Field et les siens propres appartenaient aussi jusqu'à un certain point à la catégorie des Etudes. En les travaillant l'élève devait en effet se familiariser avec le legato, apprendre à aimer et à reproduire le beau son lié du chant - et ceci grâce aux explications du maître non moins qu'à son imitation, car Chopin ne se lassait pas de jouer ces oeuvres à l'élève." (Mikuli)

 

 

 

Source : Jean-Jacques Eigeldinger (Chopin vu par ses élèves)

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
10 avril 2011 7 10 /04 /avril /2011 19:35

 

"On trouve la position de la main en plaçant les doigts sur les touches mi, fa#, sol#, la#, si : les doigts longs occuperont les touches hautes, et les doigts courts les touches basses. Il faut placer les doigts qui occupent les touches hautes sur une même ligne et ceux qui occupent les blanches de même, pour rendre les leviers relativement égaux, ce qui donnera à la main une courbe qui donne une souplesse nécessaire qu'elle ne pourrait avoir avec les doigts étendus. La main souple ;  le poignet, l'avant-bras, le bras, tout suivra la main selon l'ordre. "

 

Projet de méthode, de Chopin

 

 

 

"Ces cinq notes, mi, fa dièse, sol dièse, la dièse, si dièse [sic], résument la première leçon de l'art du piano de Chopin. Au fil de mes années d'enseignement,  je suis arrivé à la conclusion que ces cinq notes doivent servir de base à toute méthode, à toute euristique de l'enseignement. [...] Nous savons que Chopin posait la main de son élève sur ces cinq notes ; cette position était à ses yeux la plus naturelle, la plus commode, la plus détendue. Les doigts les plus courts, premier et cinquième, se trouvent sur les touches blanches, placées plus bas que les noires, occupées par les doigts les plus longs, deuxième, troisième et quatrième. Impossible d'imaginer position plus simple, plus 'naturelle', sur le clavier. Inutile de démontrer qu'il est moins aisé de disposer les cinq doigts uniquement sur les touches blanches : do, ré, mi, fa, sol."

 

Henrich Neuhaus (pianiste soviétique d'origine allemande, 1888-1964, l'un des plus grands professeurs de piano de son temps)

 

 

D'ou la grande prédilection de Chopin pour les tonalités chargées de dièses et de bémols...

Partager cet article
Repost0
20 novembre 2010 6 20 /11 /novembre /2010 22:19

 

"Chopin était entouré, adulé, gardé à vue par un petit cénacle d'amis enthousiastes qui le défendaient contre les visites importunes ou les admirations de second ordre. Son accès était difficile ; il fallait, comme il disait lui-même à cet autre grand artiste qui a nom Stephen Heller, s'essayer plusieurs fois avant de parvenir à le rencontrer." (Marmontel)

 

 

Une dizaine de ses élèves au-moins essuyèrent  tout d'abord un refus poliment décliné. Ainsi, Tellefsen (pianiste-compositeur norvégien, 1823-1874) dut patienter deux ans et demi. C'est grâce à l'intervention d'un homme de lettres lié avec George Sand qu'il pourra entrer en contact avec Chopin en 1844. 

 

 

Lenz (conseiller d'Etat impérial russe, d'origine balte, 1809-1883) y parviendra en 1842 grâce à une recommandation de Liszt. Et Lenz raconte cette première entrevue :

 

"Le domestique me dit que Monsieur Chopin n'était pas à Paris. Je ne m'y laissai pas prendre et répliquai : 'Remettez-lui la carte, je me charge du reste.' La carte en main, Chopin vint à ma rencontre ; c'était un homme jeune, de taille moyenne, élancé, maigre, le visage consumé et expressif, et mis selon la tournure parisienne la plus raffinée. Il ne m'a jamais plus été donné de me trouver en présence d'une apparition aussi naturelle dans l'élégance et la séduction. Chopin ne m'invita pas à m'asseoir, je restai debout comme devant un souverain  - 'Que désirez-vous ? Vous êtes élève de Liszt ? Un artiste ?'  - 'Un ami de Liszt. Je voudrais avoir le bonheur de faire la connaissance de vos Mazurkas sous votre direction : je les regarde comme une littérature en soi. J'en ai travaillé quelques-unes avec Liszt.' Je sentis -trop tard- que je venais de commettre un impair. 'Ah ? fit Chopin d'une voix traînante quoique des plus affables. Alors en quoi puis-je vous être utile ? Jouez-moi je vous prie ce que vous avez travaillé avec Liszt ; j'ai encore quelques minutes.'  - et il tira de son gousset une petite montre élégante : 'J'étais sur le point de sortir et j'avais interdit ma porte, veuillez m'excuser !'  [...] 

Avant de m'asseoir, je plaquai un accord 'pour sonder le gué' dis-je. La précaution et le mot parurent plaire à Chopin ; il sourit, s'appuya avec lassitude sur l'instrument et me regarda droit dans les yeux, de son regard si perspicace. Osant à peine jeté un coup d'oeil dans sa direction, j'entamai bravement la Mazurka en si bémol, si typique, et dans laquelle Liszt m'avait noté des variantes. Je m'en sortis bien et l'envolée à travers deux octaves réussit comme jamais ; l'instrument répondait plus facilement que mon Erard. Chopin murmura, très courtois : 'Le trait n'est pas de vous, n'est-ce pas ? C'est lui qui vous l'a montré  -  il faut qu'il mette sa griffe partout : il joue devant des milliers, et moi rarement pour une personne ! C'est bon, je vous donnerai des leçons, mais seulement deux fois par semaine : c'est mon maximum ; il m'est difficile de trouver trois quarts d'heure.' Il regarda de nouveau sa montre.  - 'Et que lisez-vous ? De quoi vous occupez-vous en général ?' C'était une question à laquelle j'étais bien préparé.  - 'Je préfère George Sand et Jean-Jacques à tous les autres auteurs' dis-je précipitamment ; il sourit et fut adorablement beau à cet instant.  -  'C'est Liszt qui vous l'a soufflé ; je vois que vous êtes initié, tant mieux ! Soyez ponctuel : ma maison est un pigeonnier, mon temps est minuté. Je vois déjà que nous deviendrons plus intimes ; une recommandation de Liszt  veut dire quelque chose. Vous êtes le premier élève qu'il m'envoie ; de camarades que nous étions nous voilà amis.'  "

 

 

Selon Jean-Jacques Eigeldinger, "Lenz est l'élève de Chopin qui fournit les renseignements les plus nombreux et circonstanciés sur les volontés de l'auteur quant à l'exécution de ses oeuvres. Pour Lenz, ces leçons furent l'occasion de conversations esthétiques autant que de perfectionnement pianistique. Parfois impatienté par l'impétuosité et les théories de cet élève, Chopin n'en était pas pour autant insensible au piquant de ses remarques et à sa large culture musicale ; Lenz semble lui avoir fait découvrir certaines compositions de Weber et Beethoven, alors peu ou pas répandues à Paris. Mais le Maître restait inflexible dans ses exigences pédagogiques : ainsi refusa-t-il à Lenz la permission de travailler des compositions qui excédaient ses possibilités pianistiques (Polonaise op. 26/2 ; Scherzo op. 31).

 

 

 

Source : Chopin vu par ses élèves, de Jean-Jacques Eigeldinger

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
24 octobre 2010 7 24 /10 /octobre /2010 19:19

 

Par choix, Chopin donnait très peu de concerts, ce n'était donc pas pour lui une source de revenus suffisante (seuls six ou sept concerts lui ont rapporté une recette importante). Il avait un trac terrible qui le rendait malade plusieurs semaines avant la date fatidique de sa prestation. Il estimait également que sa musique se prêtait peu aux grandes salles, et déclarait "que les concerts ne sont jamais de véritable musique, qu'on doit renoncer à y entendre ce qu'il y a de plus beau dans l'art".

 

Ses compositions étaient vendues une fois pour toutes aux éditeurs qui en devenaient propriétaires exclusifs.

 

La seule source de revenus régulière lui permettant de vivre était donc l'enseignement. Il commencera à donner des cours peu après son arrivée en France, de 1832 à 1849. Durant sa liaison avec George Sand, de 1838 à 1847, il se partagera entre la composition l'été, et l'enseignement l'hiver (d'octobre à mai). L'essentiel de ses élèves se recrutait parmi les dames du Faubourg St Germain et de l'aristocratie slave en exil à Paris (comme la princesse Marceline Czartoryska).

 

Ses élèves les plus brillants ou les plus connus furent Filtsch, Caroline Hartmann, Paul Gunsberg (tous trois décédés prématurément), Camille Dubois (née O'Meara) et Vera Rubio (née Kologrivoff), Pauline Viardot (née Garcia), Adolf Gutmann (le favori de Chopin), Thomas Tellefsen, George Mathias, Karol Mikuli, Wilhelm von Lenz, et Jane Stirling, entre autres.

 

Levé de bonne heure, Chopin donne des leçons durant toute la matinée et la première moitié de l'après-midi. La durée de la leçon varie entre trois-quarts d'heure et plusieurs heures, une à plusieurs fois par semaine, tout dépend des disponibilités de Chopin, du talent, des besoins et de la bourse des élèves. Chopin était le professeur le plus recherché et l'un des plus chers de Paris : 20 francs or (l'équivalent d'un louis) la leçon, 30 francs pour les leçons à domicile. Il était d'une ponctualité méticuleuse et s'adonnait à l'enseignement avec une foi d'apôtre.

 

 

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : De la Note à la Plume - Le blog de Carmen Desor
  • : Le compositeur Frédéric Chopin Bibliographie de Carmen Desor Valenciennes, ville d'Art
  • Contact

Rechercher