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9 juillet 2011 6 09 /07 /juillet /2011 21:01

 

[...] J'ai passé une semaine chez le prince et tu ne saurais croire comme je m'y suis senti bien. Je suis revenu par la dernière poste sans même avoir eu le temps de m'excuser de ne pouvoir rester davantage. Pour moi-même et pour mon plaisir momentané, j'y serais resté jusqu'à ce qu'on me chassât. Pourtant mes affaires et surtout le finale de mon Concerto qui attend avec impatience sa mise au point, m'ont poussé à quitter ce paradis. Il s'y trouvait deux Eves, jeunes princesses extrêmement aimables et bonnes, êtres sensibles et doués de qualités musicales. La vieille princesse, elle, sait bien que la naissance ne fait pas l'homme. Sa manière d'être est tellement attirante qu'il est impossible de ne pas l'aimer. Quant à lui, tu sais combien il est passionné de musique. Il m'a montré son Faust où j'ai trouvé beaucoup de choses très bien conçues, géniales même, dont je n'aurais jamais cru ce palatin capable. [...]

  

Extrait de la lettre de Chopin à Titus Woyciechowski, de Varsovie le 14 novembre 1829

 

 

Antonin illustration tirée d'un calendrier berlinois de 18

 

 Antonin, illustration tirée d'un calendrier berlinois de 1839

 

 

 Ce séjour d'une semaine de Frédéric Chopin (qui a alors 19 ans et demi) chez le prince Antoni Radziwill  -magnat influent, mécène, et en même temps compositeur et instrumentaliste talentueux - avait été longuement préparé. Frédéric était déjà venu deux fois à Antonin auparavant, une fois en visite depuis le domaine voisin de Strzyzew, une fois en revenant de Berlin. Le prince, impressionné par le jeune génie, avait courtoisement invité les parents de Frédéric, qui vinrent à Antonin, avec leurs filles et le comte F. Skarbek, en août 1829. Le jeune Chopin dédia par la suite au prince sa nouvelle oeuvre, le Trio en sol mineur op. 8 pour piano, violon et violoncelle, avec le souhait de la jouer ensemble, et le prince invita de nouveau Frédéric chez lui.

 

 

Palais d'Antonin

 

Palais d'Antonin, lithographie de 1836

 

 

Le palais de la localité d'Antonin (renommée ainsi en l'honneur du prince -Antoni Radziwill- à la place de son vieux nom de Szperk) fut édifié entre 1822 et 1824 sur un projet du célèbre architecte berlinois K. Schinkel : c'était un bâtiment de quatre étages en bois de mélèze, en forme de croix grecque, avec un corpus principal à huit côtés ; à quatre d'entre eux étaient accolées des ailes de trois étages, chacune également en forme de croix. Cette vaste, extraordinairement confortable et élégante résidence était conçue comme un pavillon de chasse, car le prince aimait chasser et inviter des hôtes titrés à de grandes chasses dans les vieilles forêts qui s'étendaient autour d'Antonin. Après un certain temps, il choisit cet endroit comme résidence permanente de la famille et y emménagea avec sa femme Fryderyka Dorota Ludwika Hohenzollern, nièce du roi de Prusse Frédéric II le Grand, et leurs deux filles Eliza et Wanda.

 

 

Eliza Radziwill

 

                                                            Eliza Radziwill

 

 

Wanda Radziwill 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                                                                    Wanda Radziwill

 

 

Le prince (1775-1833), compositeur de "Faust", premier opéra inspiré de l'oeuvre de Goethe, était ami avec les plus remarquables artistes de son époque et fit d'Antonin un centre culturel débordant de vie, dans lequel on s'occupait de musique, de littérature, d'arts plastiques. Il avait été nommé régent du duché de Posnanie (avec comme capitale Posen -Poznan) annexé à la Prusse après le Congrès de Vienne. Ses filles étaient aussi pleines de talent. Frédéric écrivait au sujet de la plus jeune, Wanda : "C'est jeune, dix sept ans, joli et, par Dieu, c'était bien agréable de lui poser les doigts sur le clavier. Mais, plaisanterie à part, elle a vraiment beaucoup de sens musical.  Ce n'est pas à elle qu'il faut dire : ici, crescendo ; là, piano ; autre part, plus vite ; là, plus lentement, et caetera. Je n'ai pu refuser de leur envoyer ma Polonaise en fa mineur qui intéressera la princesse Elise [...]"

 

Eliza peignit deux portraits de Chopin pendant son séjour, dont il parlait avec une grande reconnaissance. Frédéric composa alors la Polonaise en do majeur op. 3 pour piano et violoncelle, pour la jouer avec le prince. Radziwill de son côté lui soumit ses propres oeuvres encore inachevées.

  

numérisation0049 (dessin au crayon de 1826)

 

 "... Tu voudrais mon portrait. Si je pouvais en voler un à la princesse Elise, je te l'enverrais. Elle en a dessiné deux de moi dans son album et ils sont dit-on, fort ressemblants..."

 

 

Palais d'Antonin intérieur

 

 Intérieur du palais

 

 

Antonin famille Radziwill à table par Elisa Radziwill

 

 

 

 

Source : Sur les pas de Chopin, Bosz

 

 

 

 

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commentaires

B
<br /> <br /> On se met dans l'époque... On vit avec Chopin ces moments délicieux qu'il a dû passer dans cet original château.<br /> <br /> <br /> (j'ai noté que le Prince était mort avant Frédéric...) C'est amusant de voir sur le dessin, les coiffures "3 chignons" des dames... Et quel beau jeune homme il semblait être...<br /> <br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> C'est en effet une bâtisse des plus originales, octogonale, aux effets saisissants ! Il est fascinant de s'imaginer Chopin et ses hôtes évoluer dans cet endroit, qui n'a pas subi les affres de la<br /> guerre.<br /> <br /> <br /> Il était beau, et quelle prestance... !<br /> <br /> <br /> <br />

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